자료: http://www.lyc-arsonval-brive.ac-limoges.fr/jp-simonnet/IMG/pdf/La_dynamique_du_capitalisme.pdf
출처: Cité scolaire d’Arsonval (다른 출처)
제목: Fernand Braudel "La dynamique du capitalisme"
※ 프랑스 어느 고등학교의 강의 보교재 같다. 주로 원저의 내용을 발췌해서 교육용으로 재배치해놓았다.
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차례
I. L’Auteur : Biographie, Oeuvres principales, BiographiesII. Introduction
III. Questions posées par l’auteur *
IV. Postulats
V. Hypothèses
VI. Résumé
Conférence n°1 : ‘En repensant à la vie matérielle et à la vie économique’
- La vie matérielle
- Economie d’échange, économie de marché
- Vie matérielle, vie économique et capitalisme
- L’économie de marché
- Le capitalisme
- Le capitalisme, la société et l’état
- Economie mondiale et économie monde
- Marchés nationaux et économies nationales
- La révolution industrielle anglaise
- Le Monde et le Capitalisme d’aujourd’hui à la lumière du Monde et du Capitalisme d’hier
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I. L’Auteur : Biographie ㅡ Fernand Braudel (1902-1985) (생략)
(...) Née avec la revue des Annales d'histoire économique et sociale, l'Ecole des Annales, fondée en 1929 par Marc Bloch et Lucien Febvre, rassemblait un groupe d'historiens qui, rejetant l'histoire traditionnelle événementielle, privilégiait la longue durée et cherchait à s'ouvrir aux autres sciences humaines. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'importance des Annales fut reconnue avec la création de la VIe section de l'Ecole pratique des hautes études confiée à Fernand Braudel.
Depuis les années 70, des historiens comme Georges Duby, Emmanuel Leroy-Ladurie, François Furet ou Jacques Le Goff, poursuivent le projet interdisciplinaire des fondateurs de l'Ecole des Annales, et s'appuient dans leurs travaux sur l'anthropologie et la sociologie. Cette "nouvelle histoire" s'intéresse particulièrement à l'histoire des mentalités.
II. Introduction
Avant toute chose, nous tenons à préciser que cet ouvrage représente une réflexion intermédiaire entre deux ouvrages du même auteur. Ne les ayant pas lu, la difficulté majeure que nous avons rencontré a d’abord été le manque de recul par rapport aux références citées puis la non connaissance de nombre des thèmes abordés dans ces mêmes ouvrages.
Ce livre reproduit le texte de trois conférences que Fernand Braudel fit à l’université de Johns Hopkins aux Etats-Unis en 1976. Cette édition fut publiée avant la sortie de son livre "Civilisation matérielle, Economie du capitalisme". Il s’agit ici de la présentation de cet ouvrage.
III. Questions posées par l’auteur
Nous avons mentionné les principales questions posées par l’auteur dans le résumé de l’ouvrage (partie : VI résumé).
IV. Postulats
Le marché caractérise la nature des objets entre- valeur d’usage : ce qui reste hors du marché
- valeur d’échange : ce qui franchit la porte du marché
Le monde de l’échange se trouve strictement hiérarchisé : des métiers les plus humbles jusqu’aux négociants capitalistes. Fernand Braudel oppose les trois termes suivants : vie matérielle, vie économique et capitalisme.
ㅡ Vie matérielle : marquée par les balbutiements d’une économie d’échange (1400 à 1800 en occident) qui réalise le lien entre production et consommation. Une grande part de la production se perdant dans l’autoconsommation.
ㅡ Vie économique : marquée par une économie de marché organisant la production et orientant (‘commandant’) la consommation et se distinguant en 2 formes d’échanges :
- la première forme est caractérisée par un commerce réglementé, loyal, transparent, terre à terre et fonctionnant sous le régime de la concurrence. Il s’agit d’un marché public traditionnel circonscrit au marché intérieur.
- la seconde, véritable contre marché, fuyant la transparence et le contrôle et cherchant à s’absoudre des règles du marché traditionnel est marquée par des échanges inégaux et prédomine dès que l’on s’élève dans la hiérarchie des échanges. Elle s’organise "au loin", dégage d’importants profits et est détenue par une minorité de personnes.
ㅡ Capitalisme : système vivant sur le marché dont il est la partie supérieure ou la seconde forme d’échange et non lié à la production, dans le sens où il ne crée pas de mode de production qui lui serait propre. La recherche des bénéfices prend le pas sur l’organisation des marchés.
- Fernand Braudel refuse d’opposer les concepts d’économie de marché et de capitalisme dans la mesure où tout capitalisme est à la mesure des économies qui lui sont sous-jacentes.
{똑같은 내용을 두고도 평가하는 시각이 정반대다. 일반적으로 알려지기로는 시장경제와 자본주의를 첨예하게 대립하는 것으로 본다고들 풀이한다(적어도 날카롭게 구분한다는 식)} - Le capitalisme est une triple réalité de l’ordre sociale, politique et de civilisation et ne peut dès lors se concevoir sans la complicité active de la société et donc de l’Etat. Il se caractérise ainsi par la prise en compte des sous-ensembles de la société. Aussi au regard des expériences occidentales, orientales et asiatiques, il y a des conditions sociales à la poussée et à la réussite du capitalisme, notamment une nécessité de ‘tranquilité’ sociale et d’une certaine ‘complaisance’ de l’Etat. Toutefois, si celui-ci{=capitalisme} a besoin d’une hiérarchie pour exister, il ne les invente pas, il les utilise, de même qu’il n’a pas inventé le marché ni la consommation.
{브로델의 시각에서는 자본주의의 실체가 ‘경제’라는 사회의 부분집합에 한정된 것으로 보지 않는다. 자본주의는 경제에 인접하는 정치, 문화, 사회적 위계 체계 등 사회의 다른 부분집합과 상호침투하면서 매우 복잡한 부속물들의 구조를 형성한다고 보는 입장이다. 그래서 각 부분집합에 비추어진 모습을 빼놓고는 자본주의라는 실체를 이해할 수 없다고 보는 게 브로델의 입장이다. 따라서 이 텍스트의 평가가 브로델을 정확히 이해하고 있다고 볼 수 있다. 흔히 자본주의라는 경제 영역(층위)를 설명하면서 국가를 끌어들이는 것은 논리적으로 상충된다고 보는 시각이 있지만, 브로델을 잘못 이해한 것이라고 봐야할 듯하다}
Le monde se partage structurellement entre privilégiés et non privilégiés. Il y a une sorte de société mondiale, aussi hiérarchisée qu’une société ordinaire et qui est comme sont image agrandie mais reconnaissable. Aussi, l’économie mondiale s’articule, depuis le XVe siècle, autour d’économies-mondes successives qui de part leurs évolutions signalent une histoire profonde du monde. Organisées autour de pôles centraux, une ville ou une capitale d’aujourd’hui, elles partitionnent le monde, l’organisation des sociétés, les libertés individuelles et les richesses en zones concentriques de moins en moins favorisées à mesure que l’on s’éloigne du centre. Tout décentrage s’accompagne automatiquement d’un recentrage, signifiant le déplacement du centre de contrôle et de profit et marquant l’avènement d’une nouvelle domination économique. Le triomphe économique n’est bien souvent pas lié à une meilleure conception des affaires, ni au jeu naturel de la concurrence mais à une prise de pouvoir par la violence. Le capitalisme vit de cet étagement régulier : les zones externes nourrissent les zones médianes, et surtout les centrales. Ce dernier n’étant rien d’autre que la superstructure capitaliste de l’ensemble de la construction. Il y a là convergence d’intérêts :
- le centre dépend des approvisionnements de la périphérie,
- la périphérie dépend des besoins du centre qui lui dictent sa loi.
Aussi, si le capitalisme est une ‘création de l’inégalité du monde’ et les échanges lointains la partie que se réserve ‘le grand capital’, alors il apparaît que toute économie-monde se manipule souvent du dehors.
Malgré son changement de taille et de proportions, le capitalisme de la seconde moitié du XXe siècle n’a pas changé de nature :
- il existe aux dimensions du monde et tend vers le monde entier,
- il s’appuie toujours sur des monopoles de droit ou de fait,
- et il ne recouvre pas toute la société au travail, toute l’économie.
Le capitalisme[:]
- est le résultat de la dérive des activités économiques au sommet de la hiérarchie des échanges,
- représente la zone de haut profit et se situe au dessus de la double épaisseur constituée de la vie matérielle et de l’économie ‘cohérente’ de marché.
- Son caractère monopolistique est historique et sa nature opportuniste et adaptative lui permet de traverser les siècles en continuant d’utiliser à son avantage les circonstances de la conjoncture. Il reste en cela très fidèle à lui même.
V. Hypothèses
- A propos de la diffusion au XVIIIe siècle des techniques d’une société à l’autre : le capitalisme serait à l’origine de la suprématie de l’Europe du simple fait qu’il ne se soit pas diffusé par masses entières.
- La source première d’asservissement est-elle celle de la dépendance de l’homme à un système représenté par le capitalisme ou celle, universelle, de la dépendance de l’homme à un autre homme incarnée par l’existence de hiérarchies ?
VI. Résumé
Conférence n°1 : ‘En repensant à la vie matérielle et à la vie économique’
‘L’histoire économique’ est l’histoire entière des hommes, regardée d’un certain point de vue. Elle regroupe aussi l’histoire des grands acteurs, l’histoire des grands événements, de la conjoncture et des crises et l’histoire massive et structurale en perpétuelle évolution. L’énorme quantité de données, faits et explications que cela comprend a obligé l’auteur à ne prendre en compte, pour la rédaction de son livre, que les équilibres et déséquilibres profonds du long terme. En effet, L’élément qui lui a semblé primordial dans l’économie préindustrielle est la coexistence des rigidités, inerties et pesanteurs d’une économie encore élémentaire, avec des bribes d’une croissance moderne. Ainsi, la coexistence de paysans vivant presque en autarcie et d’une économie de marché en expansion a façonné le monde actuel où nous vivons.
La vie matérielle
L’auteur a désiré commencer par l’inertie, mais ‘l’obscurité’ du sujet l’a contraint à se restreindre dans un premier temps à des critères concrets, en partant du quotidien de la vie, de la routine des hommes ; ces incitations, pulsions, façons ou obligations qui remontent souvent au fin fond des âges, et que l’auteur a résumé en une seule expression : la vie matérielle.
Le premier livre de Fernand Braudel traite d’une exploration, nous nous proposons de le découper en ses principaux chapitres. Le premier concerne ‘Le nombre des hommes’. Le premier point de la vie matérielle que l’on peut étudier est la reproduction. L’évolution démographique peut se découper en deux périodes : jusqu’au XVIIIe siècle, ‘le jeu démographique tend à l’équilibre du fait des cataclysmes (guerres, maladies, conditions de vie, etc..…) mais celui ci s’atteint rarement’. Ce constat amène l’auteur à corréler la réalité biologique de l’époque à l’histoire des hommes et aux questions qui en résultent : Combien sont-ils ?, De quoi souffrent-ils ?, Peuvent-ils conjurer leurs maux ?
Les chapitres suivants abordent des questions d’ordre sociologique : Que mangent-ils ?, Que boivent-ils ?, Comment s’habillent- ils ?, Comment se logent-ils ? En effet, le comportement alimentaire et social de l’homme reflète ce qu’est réellement l’homme et participe à l’élaboration des sociétés. Des constatations analogues s’imposent au sujet des techniques. La concentration économique appelle les concentrations des moyens techniques et le développement des technologies. Autant les sciences et techniques se diffusent aisément et sont partagées par des sociétés éloignées, autant les associations et groupements de techniques, peut être plus spécifiques à certaines sociétés, se diffusent mal. Ainsi, le capitalisme, que l’auteur définit comme une somme d’artifices, de procédés, d’habitudes, de performances, serait à l’origine de la suprématie de l’Europe du simple fait qu’il ne se soit pas diffusé par masses entières.
Les deux derniers chapitres sont consacrés à la monnaie et aux villes car ceux ci sont à la fois l’origine et la conséquence des changements. Ils sont traités à part car l’auteur les considère comme des moteurs et indicateurs du changement.
Economie d’échange, économie de marché
L’habituel se situe entre routine et décision consciente, au même titre que l’économie d’échange, qui tout en faisant le lien entre production et consommation, marque, de 1400 à 1800, leur déséquilibre ; une grande part de la production se perdant dans l’autoconsommation. Les progrès de l’économie de marché organisent petit à petit la production et orientent et commandent ainsi la consommation. Elle est donc la liaison dynamique entre ces deux univers, initiatrice de progrès. L’histoire économique se résume donc selon l’auteur à l’économie de marché. {이 요약은 잘못된 것으로 생각된다. 물질생활을 고려하지 않고 시장에만 주목하는 경제사는 절름발이이 될 위험이 있다고 지적하고 있기 때문. 강의 2의 앞부분에서.}
Vie matérielle, vie économique et capitalisme
L’auteur caractérise ensuite le marché de la façon suivante : ‘tout ce qui reste en dehors du marché n’a qu’une valeur d’usage, tout ce qui en franchit la porte étroite acquiert une valeur d’échange. Selon qu’il est d’un coté ou de l’autre du marché élémentaire, l’individu, l’agent, est ou n’est pas inclus dans l’échange, dans ce que j’ai appelé la vie économique pour l’opposer à la vie matérielle ; pour le distinguer aussi du capitalisme’. L’auteur définit deux registres de l’économie de marché :
- Au niveau inférieur, les marchés, les boutiques et les colporteurs
- Au niveau supérieur, les foires dominées par les négociants et les bourses
Un marchand est donc un agent élémentaire de l’échange et une boutique est un lieu d’échange continu où les crédits sont facilités.
Les principales questions posées par l’auteur : ‘En quoi les outils de l’échange peuvent-ils nous aider à expliquer, en gros, les vicissitudes de l’économie européenne de l’Ancien Régime, entre XVe et XVIIIe siècle? En quoi, par ressemblance ou par contraste, peuvent-ils éclairer, pour nous, les mécanismes de l’économie non européenne, dont on commence seulement à connaître quelque chose ?’
Pour répondre à ces questions, l’auteur retrace l’évolution de l’occident du Xve siècle au XVIIIe siècle. Au XVe siècle, une reprise de l’économie eu lieu avec boutiques et marchés urbains comme rôle moteur. Le XVIe siècle vit l’élargissement de l’économie atlantique, avec comme moteur l’activité des foires internationales, qui ont permis un énorme trafic de crédit et d’argent, change et rechange. Le XVIIe siècle fut une période de recul ou stagnation économique pendant laquelle l’activité qui persiste s’appuie sur un retour à la marchandise, à un échange de base. Les instruments et institutions économiques à flux continus ont pris le pas sur ceux à flux intermittents : les foires furent progressivement remplacées par des bourses et les marchés par des boutiques. Une accélération économique globale intervint au XVIIIe siècle, pendant laquelle tous les outils de l’échange ont été logiquement en service. Les bourses étant instaurées, l’argent et les crédits courent ainsi de plus en plus librement d’une place à l’autre tandis que les foires ne subsistent que dans les économies traditionnelles. L’apparition d’un contre marché vient s’ajouter à cette période avec le développement du private market, dans lequel des chaînes commerciales autonomes se mettent en place, véritables organisations d’achats directs aux producteurs, en dehors du marché.
Problématique : ‘Si les rivages de l’Europe que nous venons de décrire existent hors Europe, peut-on les utiliser pour un essai d’analyse comparative ?’ L’auteur se demande également si à partir de cette comparaison, il était possible de prévoir le fossé creusé par la révolution industrielle entre l’Europe et le reste du monde au XIXe siècle et si l’Europe disposait ou non d’une avance avant même cette révolution.
Partout dans le monde non européen, des marchés sont présents dans des sites ni campagnes ni ville où se mêlent paysans et marchands. Un marché par village est essentiel en Inde pour assurer la transformation des redevances en nature en redevances en argent par les marchands Banyans. Cette organisation peut aussi bien être une imperfection du système qu’un private market. L’Inde présente une multitude de foires, et donc des structures d’échange du registre supérieur, mais elles ne sont que le symbole d’une économie traditionnelle. L’organisation en Canton de la Chine forme une matrice autour des villes assurant leur ravitaillement. Les structures de registre inférieur sont nombreuses alors que les foires et bourses font défauts. Deux explications peuvent alors expliquer ce système : soit le gouvernement est hostile à des formes supérieures de l’échange du registre supérieur, soit la circulation des marchés élémentaires suffit à l’économie chinoise. Le Japon, quant à lui, présente quelques éléments de l’étage supérieur de l’échange avec des réseaux de grands marchands. Les villes de l’Islam, possédaient également des instruments des étages supérieurs de l’échange.
En conclusion, l’économie européenne possédait selon l’auteur un développement plus avancé du fait de la supériorité de ses instruments et institutions telles que les bourses et les diverses sortes de crédits. Cependant, toutes ces structures peuvent se retrouver hors Europe, développées et utilisées à des degrés divers, qui peuvent nous permettre d’effectuer un classement des économies des différents pays selon ce critère.
Conférence n°2 : ‘Les jeux de l’échange’
Fernand Braudel aborde dans cette conférence ce qui relève proprement de l’échange et qu’il désigne : ‘à la fois comme l’économie de marché et comme le capitalisme’. Jusqu’au 18e siècle, ces deux groupes d’activité sont minoritaires, la masse des actions des hommes ‘restant contenue dans le domaine de la vie matérielle’. L’économie de marché, malgré des succès spectaculaires, manque souvent d’épaisseur. Quant au capitalisme, il ne saisit pas l’ensemble de la vie économique et ne crée pas de ‘mode de production’ qui lui serait propre et tendrait, de lui même, à se généraliser.
L’économie de marché
L’auteur identifie les signes annonciateurs de l’élargissement de l’économie de marché entre le XVe et le XVIIIe siècles à travers le constat de la variation en chaîne des prix des marchés dans le monde entier. Bien ou mal, une certaine économie relie entre eux les différents marchés du monde. Ainsi, il présente le périmètre du marché national comme étant la zone, étroite et sensible, où il est possible d’agir et ainsi d’influer sur le marché international. Il représente de plus un moyen de régulation et de contrôle. L’auteur exprime ici ses plus vives réserves quant à l’idée d’un libéralisme bien pensant : ‘je crois aux vertus et à l’importance d’une économie de marché, mais je ne crois pas à son règne exclusif.’ Tout en admettant les vertus concurrentielles du marché, il rappelle que celui-ci n’est qu’une liaison imparfaite entre production et consommation.
Le capitalisme
Ce terme est utilisé par défaut et avec précaution par l’auteur pour définir entre le XVe et le XVIIIe siècles des activités et des processus réclamant une appellation particulière que l’auteur ne veut classer dans l’économie de marché. Il pose le débat du sens et de l’apparition du capitalisme, notamment par rapport à la période de la révolution industrielle. Ainsi, Capital et Capitaliste sont les deux mots qui donnent son sens au Capitalisme. Capital étant le mot clef et prenant le sens appuyé de bien capital. Il désigne non seulement les accumulations d’argent mais aussi les résultats utilisables et utilisés de tout travail antérieurement accompli et participant au renouvellement de la production.
Question : ‘Comment puis-je valablement distinguer le Capitalisme de l’économie de marché, et réciproquement ?’
L’auteur distingue deux sortes d’économies de marché : (A, B). La première catégorie est caractérisée par un commerce réglementé, loyal et transparent. Elle regroupe les échanges quotidien du marché, les trafics locaux ou à faible distance. Ils sont sans surprise, transparents, et il est possible de connaître à l’avance les tenants et les aboutissants et d’avoir une estimation des bénéfices. L’échange de catégorie B, à l’inverse, fuit la transparence et le contrôle. Ces deux catégories d’échange coexistent même au sein d’un ‘bourg idéal’. Elles peuvent selon les circonstances se succéder. Dès que l’on s’élève dans la hiérarchie des échanges, c’est l’économie de type B qui prédomine. Ainsi, au XVe siècle, des historiens ont constaté l’émergence parallèle au marché public d’un private market ou contre marché cherchant à s’absoudre des règles contraignantes du marché traditionnel. Il s’agit alors d’échanges inégaux où la concurrence, loi essentielle de l’économie dite de marché, a peu de place, où le marchand dispose de deux avantages :
- Il a rompu les rapports entre le producteur et celui à qui est destinée finalement la marchandise.
- Il dispose d’argent comptant.
L’auteur explique que du fait de l’efficacité de ces longues chaînes marchandes autonomes entre production et consommation, les autorités ont toléré le développement de ces contre-marchés. Il fait alors un lien direct avec l’émergence du capitalisme : la recherche des bénéfices prenant le pas sur l’organisation des marchés. Il oppose deux types de marchés : le marché intérieur, caractérisé par le marché public traditionnel et le marché au loin caractérisé par un fonctionnement de type contre-marché, dégageant d’importants profits et détenu par une minorité de personnes. L’auteur caractérise cette minorité par ces deux questions : ‘Que ces capitalistes, en Islam comme en Chrétienté, soient les amis du prince, des alliés ou des exploiteurs de l’état, est-il besoin de le dire ? Qu’ils aient à leur disposition des monopoles ou simplement la puissance nécessaire pour effacer neuf mois sur dix la concurrence, qui en douterait ?’
Ainsi le monde de la marchandise et de l’échange se trouve-t-il strictement hiérarchisé, allant des métiers les plus humbles jusqu’aux négociants capitalistes. Fernand Braudel constate qu’au cours des progrès de l’économie de marché, la totalité de la société marchande est affecté par la spécialisation, la division du travail, le processus de morcellement des fonctions sauf dans le cas de ces négociants qui, jusqu’au XIXe siècle, ne se sont pour ainsi dire jamais limités à une seule activité. L’auteur se positionne clairement à ce sujet en exprimant trois raisons à cela :
- ‘Le marchand ne se spécialise pas car aucune branche à sa portée n’est suffisamment nourrie pour absorber toute son activité’.
- La recherche du profit maximal l’amène à un comportement opportuniste et à changer ainsi fréquemment de secteur.
- ‘Une seule spécialisation a eu, parfois, tendance à se manifester dans la vie marchande : Le commerce de l’argent’.
- l’un terre à terre, concurrentiel puisque transparent ;
- l’autre supérieur, sophistiqué, dominant.
C’est dans le second qu’il situe la ‘sphère du capitalisme’. Bien que le capitalisme puisse se trouver à tous les niveaux hiérarchiques de l’économie de marché, c’est en haut de la société que le premier capitalisme se déploie et affirme sa force. Si d’ordinaire, on ne distingue pas capitalisme et économie de marché, c’est que les deux ont progressé du même pas, du Moyen Age à nos jours, et que l’on a souvent présenté le capitalisme comme le moteur de l’épanouissement du progrès du moteur économique. Ainsi {??}, Braudel refuse d’opposer ces deux concepts, et pense[:]
- que ‘c’est le mouvement d’ensemble qui est déterminant et
- que tout capitalisme est à la mesure, en premier lieu, des économies qui lui sont sous-jacentes’.
Le capitalisme, la société et l’Etat
Le capitalisme ne peut se concevoir sans la complicité active de la société. Il est une triple réalité de l’ordre sociale, politique et de civilisation. Il est nécessaire de tenir compte des sous-ensembles de la société pour caractériser le capitalisme :
- L’économique, dont le capitalisme n’est qu’une forme particulière et partielle.
- Le politique, représenté par l’Etat moderne, hérité du capitalisme, et qui tantôt le favorise en le laissant s’étendre et tantôt le défavorise en en brisant les ressorts. Le capitalisme ne triomphant que lorsqu’il s’identifie avec l’Etat, qu’il est l’Etat.
- Le culturel et le religieux, par principe opposés aux nouveautés du marché, de l’argent, de la spéculation, de l’usure mais qui finissent par dire oui ‘aux exigences impérieuses du siècle’.
- Les hiérarchies sociales et l’ambition individuelle. Toute société admet plusieurs hiérarchies, c’est à dire plusieurs chemins plausibles pour s’élever socialement (hiérarchie politique, religieuse, militaire, de l’argent, etc.…). L’ambition individuelle s’appuie en occident sur la base du cercle familial.
En occident comme au Japon, le mécanisme d’implantation du capitalisme serait issu de la lente détérioration d’une société féodale - dans laquelle les familles seigneuriales sont bénéficiaires, oisives et imprévoyantes - au profit de la bourgeoisie. Ces deux sociétés sont ainsi passées de l’ordre féodale à l’ordre de l’argent.
L’exemple de la Chine nous montre un système où la mobilité sociale à la verticale y est plus grande qu’en Europe non que le nombre des privilégiés y soit plus grand mais la société y est beaucoup moins stable. Dans les pays de l’Islam, les biens ne sont pas attachés à une personne ou à une famille mais sont distribués par l’état et sont disponibles à nouveau chaque fois que meurt le bénéficiaire. Le sommet de la société se renouvelle donc très souvent, les familles n’ayant pas la possibilité de s’incruster.
En conclusion de cette conférence, [:]
- l’auteur pense qu’il y a des conditions sociales à la poussée et à la réussite du capitalisme. ‘Celui ci exige une certaine tranquillité de l’ordre social ainsi qu’une certaine neutralité, ou faiblesse, ou complaisance, de l’état.
- Une autre idée que soulève l’auteur est que le capitalisme a besoin d’une hiérarchie pour exister, mais le capitalisme ne les invente pas, il les utilise, de même qu’il n’a pas inventé le marché, ou la consommation. Il arrive quand tout est déjà en place.
- L’auteur exprime ici un regret : les sociétés non capitalistes n’ont hélas pas supprimé les hiérarchies et conclut par une question : Faut-il casser la hiérarchie, la dépendance d’un homme vis à vis d’un autre homme ?
Objectif : lier le capitalisme, son évolution et ses moyens, à une histoire générale du monde entre le XVe et le XVIIIe siècle.
Le monde se partage structurellement entre privilégiés et non privilégiés. Il y a une sorte de société mondiale, aussi hiérarchisée qu’une société ordinaire et qui est comme son image agrandie mais reconnaissable. Question posée par l’auteur : ‘Pourquoi ces deux types de sociétés ont-elles la même texture ?’
Economie mondiale et économie-monde
En préambule il définit les expressions suivantes : économie mondiale, signifiant l’économie du monde pris dans son entier, le marché de tout l’univers ; économie-monde, expression traduite littéralement de l’allemand par l’auteur et concernant l’économie d’une portion seulement de notre planète, dans la mesure où elle forme un tout économique. Elle est apparue pour l’auteur dès l’antiquité et peut se définir comme une triple réalité car :
- elle occupe un espace géographique donné et a de ce fait des limites qui l’expliquent et qui varient, bien qu’avec une certaine lenteur,
- une économie-monde accepte toujours un pôle, un centre, représenté par une ville dominante (une capitale économique d’aujourd’hui),
- toute économie-monde se partage en zones successives. La région qui s’étend autour du centre, appelée aussi coeur, par exemple les provinces.
Pour une époque donnée, on peut délimiter grossièrement les économies-monde en place. Lentes à se déformer, elles signalent une histoire profonde du monde.
Problématique introduite par l’auteur : montrer en quoi les économies-mondes successives, bâties sur l’Europe à partir de l’expansion européenne, expliquent, ou non, les jeux du capitalisme et sa propre expansion.
Tout décentrage conduit systématiquement et automatiquement à un recentrage du centre de gravité, comme si une économie-monde ne pouvait vivre sans un pôle. Toutefois ils sont rares, mais lorsqu’ils se produisent, c’est au cours de luttes, de heurts et de crises économiques fortes. C’est souvent ‘le mauvais temps économique’ qui finit d’abattre le centre ancien, déjà menacé, et confirme l’émergence du nouveau. Les forts la traversent, les faibles y succombent : le centre ne craque donc pas à tous les coups.
Selon l’auteur : ‘c’est donc au travers de ces crises qu’il faut, sans doute, aborder l’étude difficile de ces mécanismes d’ensemble par quoi l’histoire générale se retourne.’ Il cite ici l’exemple du décentrage, au XVIe siècle, d’Anvers au profit de Gênes suite à la modification de la route de commerce du métal blanc arrivant d’Amérique et qui est à l’origine de la renaissance économique momentanée de la Méditerranée.
- Le triomphe économique ne tient pas forcément à une meilleure conception des affaires, ni au jeu naturel de la concurrence industrielle, la politique peut parfois consister à prendre simplement la place des anciens gagnants souvent par la violence. Question posée par l’auteur : ‘Faut-il dire que cette règle demeure ?’,
- Ceux qui sont au centre ou près du centre ont tous les droits sur les autres. Cela pose le problème de la partition du monde en zones concentriques de moins en moins favorisées à mesure que l’on s’éloigne du pôle. Il en va de même en ce qui concerne l’organisation des sociétés, des libertés individuelles et des richesses.
L’économie-monde européenne en 1650 c’est la juxtaposition, la coexistence de sociétés qui vont de la société déjà capitaliste, la hollandaise, au sociétés serviles et esclavagistes tout au bas de l’échelle. En fait, le capitalisme vit de cet étagement régulier : les zones externes nourrissent les zones médianes, et surtout les centrales. Ce dernier n’étant rien d’autre que la superstructure capitaliste de l’ensemble de la construction. Il y a là convergence d’intérêts :
- le centre dépend des approvisionnements de la périphérie,
- la périphérie dépend des besoins du centre qui lui dictent sa loi.
Ainsi, la thèse défendue par I. Wallerstein est une autre explication que l’habituel modèle successif : esclavage, servage, capitalisme en ce sens qu’il déclare : ‘le capitalisme est une création de l’inégalité du monde ; il lui faut, pour se développer, les connivences de l’économie internationale. Il est fils de l’organisation autoritaire d’un espace de toute évidence démesuré. Il n’aurait pas poussé aussi dru dans un espace économique borné. Il n’aurait peut-être pas poussé du tout sans le recours au travail ancillaire d’autrui.’ Cependant, selon Braudel, cette thèse n’explique pas tout, notamment en ce qui concerne les origines du capitalisme moderne c’est-à-dire ce qui se passe au delà des frontières de l’économie-monde européenne avec jusqu’à la fin du XVIIIe siècle l’existence d’économies-monde solidement organisées en Asie. Aussi, malgré les faibles quantités de marchandises échangées entre l’Occident et l’Asie, l’auteur pense que ces échanges ‘sont ceux que se réserve, de chaque côté, le grand capital’. Il en conclu même que ‘toute économie-monde se manipule souvent du dehors.’
Création des économie monde : deux phases chronologiques se distinguent.
- les créations et dominations urbaines, de type Amsterdam au XVIe siècle.
- les créations et dominations nationales, de type Londres au XVIIIe siècle.
Marchés nationaux et économies nationales
L’économie nationale est un espace politique transformé par l’Etat, en réponse à l’évolution des besoins de la vie matérielle, en un espace économique cohérent, unifié, dont les activités peuvent se porter ensemble dans une même direction. L’Angleterre, organisée sur la base d’un centre unique situé à Londres, est le premier pays à avoir réalisé cette transition, alors qu’elle créait en parallèle son marché national grâce à la qualité de ses réseaux de transport nationaux. A contrario la France a fonctionné jusqu’au XVIe siècle avec un centre politique (Paris) dissocié du centre économique (Lyon). La particularité insulaire de l’Angleterre l’a de plus ‘dégagée de l’ingérence du capitalisme étranger’ dès le XVIe siècle lui permettant de protéger son marché national et son industrie naissante, avantage unique à cette époque en Europe. Selon l’auteur, il s’agit là de la principale raison de l’avance économique anglaise sur la France au début du XIXe siècle. La prépondérance économique de l’Angleterre s’étend aussi au leadership politique et marque la fin des économies à conduite urbaine. Elle se maintiendra et conduira à la domination de l’économie mondiale par l’économie mondiale européenne.
La révolution industrielle anglaise
Problématique posée par l’auteur :
- ‘Dans quelle mesure l’industrialisation anglaise rejoint-elle ces schémas et dans quelle mesure s’intègre-t-elle à l’histoire du capitalisme ?’.
- Il se demande également pourquoi la révolution industrielle anglaise a été un succès tandis que de nombreux pays auparavant nt vu leur révolution échouer alors qu’elle aurait été virtuellement possible sur le plan technique. Pourquoi est-ce en Angleterre que les pas décisifs ont été naturellement franchis ?.
La tendance actuelle est de plus en plus, de considérer la révolution industrielle comme un phénomène d’ensemble, lent, qui implique par suite des origines lointaines et profondes. ‘Tous les secteurs de l’économie anglaise ont répondu aux exigences de ce soudain emballement de la production, pas de panne, pas de blocage’. D’où la question : ‘N’est-ce pas toute l’économie nationale qui est à mettre en cause ?’. Selon Fernand Braudel, cette mutation n’a pas pour origine le capitalisme marchand et financier. Aussi, c’est la force, la vie de l’économie de marché et même de l’économie à la base, de la petite industrie innovatrice, qui portent sur leur dos ce qui sera bientôt le capitalisme dit industriel. Celui-ci n’a pu grandir, prendre forme et force qu’à la mesure de l’économie sousjacente. Toujours selon l’auteur, le monde a été le complice efficace de la révolution anglaise avec l’apparition continuelle de nouveaux marchés parfois liée à la découverte de nouveaux territoires. Cette puissance, si elle se forme par un lent travail sur elle-même, se renforce par l’exploitation d’autrui et, au cours de ce double processus, la distance qui la sépare des autres augmente.
Le Monde et le Capitalisme d’aujourd’hui à la lumière du Monde et du Capitalisme d’hier
Pour conclure son ouvrage, Fernand Braudel tente de réaliser le lien entre son approche historique du capitalisme et sa réalité actuelle. Ainsi, selon lui, et malgré le fait que le capitalisme d’aujourd’hui ait changé de taille et de proportions, qu’il se soit mis ‘à la mesure des échanges de base et des moyens, eux aussi fantastiquement agrandis’, il ne croit pas que la nature de celui-ci ait changé de fond en comble. Trois preuves à l’appui :
- le capitalisme reste fondé sur une exploitation des ressources et des possibilités internationales, autrement dit il existe aux dimensions du monde, pour le moins il tend vers le monde entier. Sa grosse affaire présente : reconstituer cet universalisme.
- il s’appuie toujours, obstinément, sur des monopoles de droit ou de fait, malgré les violences déchaînées à ce propos contre lui. L’organisation, comme l’on dit aujourd’hui, continue à tourner le marché. Mais on a tort de considérer que c’est là un fait vraiment nouveau.
- Plus encore, malgré ce que l’on dit d’ordinaire, le capitalisme ne recouvre pas toute l’économie, toute la société au travail ; il ne les enferme jamais l’une et l’autre dans un système, le sien, et qui serait parfait. Ainsi la tripartition : vie matérielle, économie de marché, économie capitaliste conserve une étonnante valeur présente de discrimination et d’explication.
L’auteur caractérise finalement le capitalisme comme le résultat de la dérive des activités économiques ‘au sommet ou qui tendent vers le sommet’. Aussi ‘ce capitalisme de haut vol’ représente la zone du haut profit et se situe au dessus de ‘la double épaisseur sous-jacente de la vie matérielle et de l’économie cohérente de marché’. Il affirme de plus que son caractère monopolistique est historique et que transferts de marchandises et de capitaux ont toujours été simultanés. Il réfute l’idée d’une évolution de sa nature à travers les siècles et pense au contraire que sa caractéristique et sa force sont de pouvoir passer ‘d’une ruse à l’autre, d’une forme d’action à une autre’, en fait d’utiliser à son avantage les circonstances de la conjoncture et finalement de rester assez fidèle, assez semblable à lui même. Il renvoie alors dos à dos les conceptions des ‘deux mondes’ de l’époque, le monde capitalisme et le monde socialiste, en insistant sur la nécessité de distinguer capitalisme et économie de marché. Il poursuit en récusant toute tentative d’amalgame considérant selon que l’on se trouve d’un côté ou de l’autre :
- le capitalisme comme le pendant obligé de la libre entreprise et de l’économie de marché,
- la réduction des libertés comme l’envers obligé de la destruction du fléau capitaliste.
VII. Commentaires et conclusions
Au regard de la complexité de cet ouvrage et de la qualité de son contenu, nous préférons éviter de nous lancer dans une analyse critique que nous ne maîtriserions pas et qui serait truffée d’inepties. Par ailleurs le manque de références directes sur les sujets abordés et donc de recul nous force à considérer cette lecture comme une lecture initiatrice. Aussi, il nous semble simplement intéressant de constater que l’approche historique du capitalisme, notamment à travers la réflexion sur ses fondements, ses conditions d’apparition et ses modes d’expansion, est remarquablement vulgarisée dans cette ouvrage.
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