I. B.− P. anal.
1. [Axe temporel; dans un processus de formation, d'évolution]
a) Commencer, donner naissance à une chose.
- Toutes les statues possibles étaient ébauchées en lui (Jouhandeau, M. Godeau, 1926, p. 272).
- C'est une loi naturelle que toute chose ébauchée tend à accomplir sa destinée possible (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 164).
♦ [En parlant des productions de l'esprit]
- Des mots, sans lien, s'entrechoquent dans sa tête. Des phrases, même, s'ébauchent, avec des sonorités de meetings (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 687).
- Et je me sens l'esprit vaguement pressentir tout le trésor infus des réponses qui s'ébauchent en moi devant une chose qui m'arrête et qui m'interroge (Valéry, Variété V, 1944, p. 12).
- Des mouvements de colère s'ébauchaient au plus noir de moi-même; mais je pouvais encore les contenir (Bosco, Mas Théot., 1945, p. 9).
- L'audacieux projet d'enlèvement qui commençait à s'ébaucher en mon cœur (Gide, Thésée, 1949, p. 1441).
- Les échanges d'information technique et scientifique, la spécialisation des fabrications, la standardisation des armements sont à peine ébauchés par l'OTAN (Billotte, Considér. strat., 1957, p. 4210).
- ... toute une série de mesures introduisant graduellement la classe ouvrière dans la puissance économique et ébauchant un demi-communisme dans la production paysanne. Jaurès, Ét. socialistes, 1901, p. 65.
- Déjà s'ébauche à l'intérieur de la religion paulinienne elle-même le conflit qui déchirera plus tard l'église et la divisera en protestants et catholiques, en jansénistes et jésuites (J. Vuillemin, Essai signif. mort, 1949, p. 204).
- En 1941, la résistance s'ébauchait à peine (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 238).
− [En parlant d'un phénomène génétique] Commencer à se réaliser.
- Toute la première division de la vie animale, celle qui a rapport à l'action des corps extérieurs sur le nôtre, est à peine ébauchée dans le fœtus (Bichat, Rech. physiol. vie et mort, 1822, p. 198).
- La larve intelligente qui palpite et s'ébauche dans le limon primitif (Faure, Hist. art, 1921, p. 207).
- Sortis de la confusion originelle, on les [les organismes] voit s'ébaucher en masses informes, sans organes différenciés, puis essayer un ordre embryonnaire où les organes modèlent une forme fruste, non déliée, dont les membres semblent encore engagés dans la matrice obscure, ... Faure, L'Esprit des formes, 1927, p. 58.
- Les corps animés renfermaient « quelque puissance naturelle et une matière déjà ensemencée, et, en quelque façon, les commencements ébauchés des êtres à venir, qui devaient sortir de leur corruption » (J. Rostand, Genèse vie, 1943, p. 14).
- Il ébauchait une calvitie dont il disait lui-même sans tristesse : « crâne à trente ans, genou à quarante » (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 157).
- À mesure que l'enfant grandissait, de lointaines ressemblances, s'ébauchant sur son visage, émouvaient doucement l'aïeule (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 67).
- Avec soudain dans leurs faces ébauchées [de deux élèves] des yeux d'hommes (Druon, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 92).
2. Au fig., littér. [P. anal. avec la naissance d'une œuvre en cours d'exécution; dans un processus de perception, en parlant d'êtres imaginaires ou existants] Faire apparaître les contours, la forme générale d'une chose, d'un être. (Quasi-)synon. dessiner, esquisser.
a) [Le suj. désigne l'être lui-même]
- De grands arbres ébauchaient dans le noir leurs formes menaçantes (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 271).
- En haut, l'homme ne bougeait plus. À peine ébauché des ténèbres il s'était refondu dans les ténèbres (Bosco, Mas Théot., 1945, p. 192).
- En des reculs de brume s'ébauchait le cône vaporeux des sapins (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 22).
- Quelques maquignonnages s'ébauchèrent au dessert qui me mirent les nerfs à vif (Gracq, Syrtes, 1951, p. 72).
- Et, quant à moi, je vois des serpentes, des stryges, Tout un fourmillement de monstres, s'ébaucher Dans la brume qui sort des fentes du plancher (Hugo, Légende, 1859, p. 368).
- Et, dans le brouillard, déjà s'ébauchait cette image familière qui hante mes instants de demi-conscience et de demi-sommeil, ma propre-image, comme un masque sur le fond de la nuit. Daniel-Rops, Mort, où est ta victoire? 1934, p. 346.
- Les compositions de Goya sont des nuits profondes où quelque brusque rayon de lumière ébauche de pâles silhouettes et d'étranges fantômes (Gautier, Tra los Montes, 1843, p. 118).
- La fumée d'une flambée ébauchant dans ses méandres des monstres errants (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 97).
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