2011년 1월 22일 토요일

[자료] Survol des 5000 dernières années en économie

자료: http://reseau-ecobatir.org/St-Romain/articles/economie-du-bourg.html

par Alain Marcom,
artisan maçon dans la scop Inventerre et membre du RÉSEAU écobâti


Marcel Mauss (1872-1950).
Essai sur le don / liberalité, honneur, monnaie
Sociologie et anthropologie, Marcel Mauss, éd. PUF Quadrige, Janvier 1995. (Extraits de la page 179 à 278)

A plusieurs reprises, on a vu combien toute cette économie de l’échange-don était loin de rentrer dans le cadre de l’économie soi-disant naturelle, de l’utilitarisme . Tous ces phénomènes si considérables de la vie économique de tous ces peuples – disons pour fixer les esprits, qu’ils sont bons représentants de la grande civilisation du néolithique – et toutes ces survivances considérables de ces traditions, dans les sociétés proches de nous ou dans les usages des nôtres, échappent aux schèmes que donnent d’ordinaires les rares économistes qui ont voulu comparer les diverses économies connues. (…) La notion de valeur fonctionne dans ces sociétés. Des surplus très grands, absolument parlant, sont amassés. Ils sont dépensés souvent en pure perte, avec un luxe relativement énorme et qui n’a rien de mercantile ; il y a des signes de richesse, des sortes de monnaies qui sont échangées. Mais toute cette économie très riche est encore pleine d’éléments religieux : la monnaie a encore son pouvoir magique et est encore liée au clan ou à l’individu ; les diverses activités économiques, par exemple le marché, sont imprégnées de rites et de mythes ; elles gardent un caractère cérémoniel, obligatoire, efficace ; elles sont pleines de rites et de droit. A ce point de vue nous répondons déjà à la question que posait Durkheim à propos de l’origine religieuse de la notion de valeur économique. Ces faits répondent aussi à une foule de questions concernant les formes et les raisons de ce qu’on appelle si mal l’échange, (…) qu’une économie historique met à l’origine de la division du travail. C’est bien autre chose que de l’utile qui circule dans ces sociétés de tous genres. (..) Cette perpétuelle effervescence économique est bien moins prosaïque que nos ventes et achats, que nos louages de service ou que nos jeux de bourse. (…) Les termes que nous avons employés : présent, cadeau, don, ne sont pas eux-mêmes tout à fait exacts. Ces concepts de droit et d’économie que nous nous plaisons à opposer : liberté et obligation ; libéralité, générosité, luxe et épargne, intérêt et utilité, il serait bon de les remettre au creuset. C’est une notion complexe qui inspire tous les actes économiques que nous avons décrits ; et cette notion n’est ni celle de la prestation purement libre et purement gratuite, ni celle de la production et de l’échange purement intéressé de l’utile. C’est une sorte d’hybride (…).
page 266

« Selon nous l’humanité a longtemps tâtonné. D’abord, première phase, elle a trouvé que certaines choses, presque toutes magiques et précieuses, n’étaient pas détruites par l’usage et elle les a douées de pouvoir d’achat. Puis dans une deuxième phase, après avoir réussi à faire circuler ces choses, dans la tribu et hors d’elle, au loin, l’humanité a trouvé que ces instruments d’achat pouvaient servir de moyen de numération et de circulation de richesses.
page 179

 (…) Voilà donc ce que l’on trouverait au bout de ces recherches. Les sociétés ont progressé dans la  mesure où elles-mêmes, leurs sous-groupes et enfin leurs individus ont su stabiliser leurs rapports, donner, recevoir, et enfin rendre. Pour commercer, il a fallu d’abord savoir poser les lances. C’est alors qu’on a réussi à échanger les biens et les personnes, non plus seulement de clans à clans, mais de tribus à tribus et de nations à nations et – surtout – d’individus à individus. C’est seulement ensuite que les gens ont su se créer, se satisfaire mutuellement des intérêts et enfin les défendre sans avoir à recourir aux armes. C’est ainsi que les clans ont su (…) s’opposer sans se massacrer et se donner sans se sacrifier les uns aux autres. C’est là un des secrets permanents de leur sagesse et de leur solidarité. »
page 278
Karl Marx (1818-1883)
L’homme se constitue progressivement à partir de son affrontement utilitaire avec la nature : c’est la dialectique matérialiste. Cette idée est dans la droite ligne de Darwin. (A l époque, c’est un blasphème énorme que l’homme descende du singe et que ce sont les cultures et civilisations humaines, en se confrontant aux conditions naturelles, qui ont façonné les humains
La monnaie qui était un moyen devient dans la société capitaliste une fin en soi. Du coup celles et ceux qui produisent sous le coup de la prescription d’autrui sont aliénés. Les rapports sociaux des humains sont imbibés de cette aliénation. Le lien social est abandonné pour la circulation des marchandises.
Valeurs d’usage-valeurs d’échange : différence entre ce qui est utile, c’est à dire qui consomme du travail pour servir dans un mode économique non monétaire, et ce qui est destiné au commerce….
C’est le travail qui est l’élément commun qui permet de comparer la valeur des choses entre elles, donc de les échanger.


 Max Weber (1864-1920)
* Le désenchantement du monde (disparition progressive de la puissance magique du bien qu’on échange.)
* « L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme » : démonstration brillante de l’origine culturello-religieuse des comportements économiques.

 Fernand Braudel (1902-1985)
Marché d’un bourg, Commerce au loin
La dynamique du capitalisme, Fernand  Braudel, éd. Arthaud, 1985,
extraits des pages 51 à 59.
« Comment puis-je valablement distinguer le capitalisme de l’économie de marché ? et réciproquement ? (…)
Vous accepterez, sans trop de difficultés qu’il puisse y avoir deux formes d’économie dite de marché (A, B), discernables avec un peu d ‘attention, ne serait ce que par les rapports humains, économiques et sociaux qu’elles instaurent.
Dans la première catégorie (A) je verrais volontiers les échanges quotidiens du marché, les trafics locaux ou à faible distance : ainsi le blé, le bois qui s’acheminent vers la ville proche et même les commerces à plus large rayon, lorsqu’ils sont réguliers, prévisibles, routiniers, ouverts aux petits comme aux grands marchands : (…)
De ces échanges sans surprise, « transparents », dont chacun connaît à l’avance les tenants et les aboutissants et dont on peut supputer à peu près toujours les bénéfices mesurés, le marché d’un bourg s’offre comme un bon exemple. Il réunit avant tout des producteurs – paysans, paysannes, artisans – et des clients, les uns du bourg lui-même, les autres des villages voisins. (….)
Dès qu’on s’élève un peu dans la hiérarchie des échanges, c’est le second type d’économie (B) qui prédomine et dessine sous nos yeux une « sphère de circulation » évidemment différente. Les historiens anglais ont signalé à partir du XVème siècle, l’importance grandissante, à côté du marché public traditionnel, de ce qu’ils baptisent  le marché privé ; je dirais volontiers pour accentuer la différence, le contre-marché. Ne cherche-t-il pas en effet à se débarrasser des règles du marché traditionnel souvent paralysantes à l’excès ? des marchands itinérants, ramasseurs, collecteurs de marchandises rejoignent les producteurs chez eux. Au paysan, ils achètent directement la laine, le chanvre, les animaux sur pied, les cuirs, l’orge ou le blé, les volailles, etc . Ou, même ils lui achètent ces produits à l’avance, la laine avant la tonte des moutons, le blé alors qu’il est en herbe. Un simple billet signé à l’auberge du village ou à la ferme même scelle le contrat. (…)
Que ce type d’échange substitue aux conditions normales du marché collectif des transactions individuelles dont les termes varient arbitrairement selon la situation respective des intéressés, c’est ce que prouvent sans ambiguïté  les procès nombreux qu‘engendre en Angleterre, l’interprétation des billets signés par les vendeurs.  Il est évident qu’il s’agit d’échanges inégaux où la concurrence – loi essentielle de l’économie dite de marché – a peu de place, où le marchand dispose de deux avantages : Il a rompu les relations entre le producteur et celui à qui est destinée finalement la marchandise ( seul il connaît les conditions du marché aux deux bouts de la chaîne et donc le bénéfice escomptable) et il dispose d’argent comptant, c’est son argument principal. Ainsi de longues chaînes s’allongent entre production et consommation. (…)
Le commerce local, au contraire, se disperse entre une multitude de parties prenantes. Par exemple au XVIème siècle, le commerce intérieur du Portugal, vu dans sa masse et dans toute sa valeur monétaire supposée est de loin supérieur au commerce du poivre, des épices et des drogues. Mais ce commerce intérieur est souvent sous le signe du troc, de la valeur d’usage. Le commerce des épices est dans le droit fil de l’économie monétaire. Et seuls de gros négociants le pratiquent et concentrent ses bénéfices anormaux entre leurs mains. »

Commentaire d’après Wikipédia
- Valeur d’usage : ce qui reste hors du marché (bien fabriqué pour servir)

- Valeur d’échange : ce qui franchit la porte du marché (bien fabriqué pour échanger)
Le monde de l’échange se trouve strictement hiérarchisé : des métiers les plus humbles jusqu’aux négociants capitalistes. Fernand Braudel oppose les trois termes suivants : vie matérielle, vie économique et capitalisme.

- Vie matérielle : marquée par les balbutiements d’une économie d’échange (1400 à 1800 en occident) qui réalise le lien entre production et consommation. Une grande part de la production se perdant dans l’autoconsommation.

- Vie économique : marquée par une économie de marché organisant la production et orientant (‘commandant’) la consommation et se distinguant en 2 formes d’échanges :
         - la première forme est caractérisée par un commerce réglementé, loyal, transparent, terre à terre et fonctionnant sous le régime de la concurrence. Il s’agit d’un marché public traditionnel circonscrit au marché intérieur.
          - la seconde, véritable contre marché, fuyant la transparence et le contrôle et cherchant à s’absoudre des règles du marché traditionnel est marquée par des échanges inégaux et prédomine dès que l’on s’élève dans la hiérarchie des échanges. Elle s’organise"au loin", dégage d’importants profits et est détenue par une minorité de personnes.

- Capitalisme : système vivant sur le marché dont il est la partie supérieure ou la seconde forme d’échange et non lié à la production, dans le sens où il ne crée pas de mode de production qui lui serait propre. La recherche des bénéfices prend le pas sur l’organisation des marchés.
Le capitalisme est une triple réalité de l’ordre sociale, politique et de civilisation et ne peut dès lors se concevoir sans la complicité active de la société et donc de l’Etat. Il se caractérise ainsi par la prise en compte des sous ensembles de la société. Aussi au regard des expériences occidentales, orientales et asiatiques, il y a des conditions sociales à la poussée et à la réussite du capitalisme, notamment une nécessité de ‘tranquillité’ sociale et d’une certaine ‘complaisance’ de l’Etat. Toutefois, si celui-ci a besoin d’une hiérarchie pour exister, il ne les invente pas, il les utilise, de même qu’il n’a pas inventé le marché ni la consommation.

Le monde se partage structurellement entre privilégiés et non privilégiés. Il y a une sorte de société mondiale, aussi hiérarchisée qu’une société ordinaire et qui est comme son image agrandie mais reconnaissable. Aussi, l’économie mondiale s’articule, depuis le XVe siècle, autour d’économies mondes successives qui de par leurs évolutions signalent une histoire profonde du monde. Organisées autour de pôles centraux, une ville ou une capitale d’aujourd’hui, elles partitionnent le monde, l’organisation des sociétés, les libertés individuelles et les richesses en zones concentriques de moins en moins favorisées à mesure que l’on s’éloigne du centre. Tout décentrage s’accompagne automatiquement d’un recentrage, signifiant le déplacement du centre de contrôle et de profit et marquant l’avènement d’une nouvelle domination économique. Le triomphe économique n’est bien souvent pas lié à une meilleure conception des affaires, ni au jeu naturel de la concurrence mais à une prise de pouvoir par la violence. Le capitalisme vit de cet étagement régulier : les zones externes nourrissent les zones médianes, et surtout les centrales. Ce dernier n’étant rien d’autre que la superstructure capitaliste de l’ensemble de la construction. Il y a là convergence d’intérêts :
le centre dépend des approvisionnements de la périphérie,
la périphérie dépend des besoins du centre qui lui dictent sa loi.
Aussi, si le capitalisme est une ‘création de l’inégalité du monde’ et les échanges lointains la partie que se réserve ‘le grand capital’, alors il apparaît que toute économie monde se manipule souvent du dehors.
Malgré son changement de taille et de proportions, le capitalisme de la seconde moitié du XXe siècle n’a pas changé de nature :
il existe aux dimensions du monde et tend vers le monde entier,
il s’appuie toujours sur des monopoles de droit ou de fait,
et il ne recouvre pas toute la société au travail, toute l’économie.

Amartya Sen  (1933-)
CONSERVATISME FINANCIER ET RESPONSABILITE SOCIALE
L’économie est une science morale, éd. La découverte, 1999, extraits de la page 118 à 125.

L’idée que la liberté individuelle est une responsabilité sociale résume, d’une façon générale, la nature des obligations qu’a une société à l’égard de ses membres. Ces responsabilités ne comprennent pas seulement des mesures telles que les soins de santé, la garantie d’une éducation minimale, la lutte contre la pauvreté et la sécurité sociale (sans lesquelles l’exercice de la liberté individuelle serait extrêmement restreint) mais aussi des libertés élémentaires ainsi que des droits civils et politiques, notamment le droit de participer aux décisions publiques qui affectent la vie des citoyens. La possibilité effective de participer représente l’une des responsabilités sociales fondamentales sans laquelle on ne peut affronter les dilemmes sociaux qui sont les nôtres aujourd’hui.(…)
Finalement, on ne peut trancher les dilemmes sociaux qu’à travers les processus de choix public fondés sur la participation, le dialogue et les débats ouverts. Ces débats mettent en jeu les fins ultimes, mais aussi les moyens pratiques et de façon plus décisive encore, les procédures à travers lesquelles ces moyens et ces fins sont évalués. Le pilotage unilatéral, y compris s’il est le fait du meilleur des experts, ne saurait en soi constituer une solution. »
La liberté individuelle, comme la santé, la culture, la sécurité sociale sont des responsabilités sociales. De même le droit de participer aux décisions collectives.
Il n’y a pas de vérité économique, il n’y a que des dilemmes résolus par des débats démocratiques (qualité de l’information)

Joseph Stiglitz (1943-)
La commission Stiglitz-Sen a présenté son rapport final et ses travaux lors d'une journée à la Sorbonne le 14.09.2009. Le rapport semble s'orienter vers un tableau de bord regroupant plusieurs indices autour de trois grands axes :
Axe économie avec une amélioration de la façon de calculer le PIB
Axe bien-être. Avec une évaluation tant au niveau subjectif (ce que pensent les gens) que objectif avec prise en compte de la consommation, de la répartition des revenus etc...
Axe soutenabilité du développement avec deux grands angles d'approche :
Indicateur monétaire synthétique de soutenabilité
Des indicateurs physiques « dont l'un d'eux indique clairement dans quelle mesure nous approchons de niveaux dangereux d'atteinte à l'environnement »[8](cas du changement climatique ou des ressources halieutiques par exemple)
* Le libre fonctionnement des marchés ne conduit à un optimum économique que lorsque tous les agents économiques disposent d’une information parfaite. On peut parler d’asymétrie de l’information.
* Les prix doivent refléter toute l’information disponible
* Le comportement des acteurs économiques n’est pas toujours rationnel. Beaucoup des économistes sont dans la croyance

Ivan Illich  (1926-2002)
(entre Marx et Illich, le » travail »  est devenu » énergie métabolique »)
* Le travail métabolique  est au centre de la structure sociale.
* Utilisation au niveau macroéconimique des  notions de « coût global », d’internalisation des externalités, du concept de ressource limitée ou d’analyse des cycles de vie
* Dans « Energie et Equité » Ivan Illich démontre que la vitesse est une ressource limitée, c’est à dire que celles et ceux qui en consomment beaucoup le font au détriment de ceux qui y ont un faible accès.
* La notion de seuil caractérise aussi sa pensée : en deça d’un certain seuil les choses se passent d’une certaine façon, au delà c’est tout autre chose qui se passe. (On n’est pas très loin de la théorie mathématique dite du Chaos
« Pour que les rapports sociaux soient placés sous le signe de l’équité, il faut qu’une société limite d’elle-même la consommation d’énergie de ses plus puissants citoyens »

ENERGIE ET EQUITE
Énergie et équité. Illich, Ivan. Deuxième édition traduite de l'allemand par Luce Giard. Annexe de Jean-Pierre Dupuy. Paris, Seuil, 1975.
 « à nous laisser aveugler par des considérations écologiques, nous accorderons à l’écologiste que l’emploi de forces d’origine non physiologiques pollue l’environnement et nous ne verrons pas qu’au delà d’un certain seuil, les forces mécaniques corrompent le milieu social. » (l’éducation devient un instrument de coercition au service des visées de la technocratie, croissance solidaire de l’institution et du capital) (…)
« Le banlieusard captif du trajet quotidien et le voyageur sans souci sont pareillement dépendants du transport. Tous deux ont perdu leur liberté. L’espoir d’un occasionnel voyage-éclair à Acapulco ou à un congrès du parti fait croire au membre de la classe moyenne qu’il a « réussi » et fait partie du cercle étroit, puissant et mobile des dirigeants. Le rêve hasardeux de passer quelques heures attaché sur un siège propulsé à grande vitesse rend même l’ouvrier complice consentant de la déformation imposé à l’espace humain et le conduit à se résigner à l’aménagement du pays non pour les hommes mais pour les voitures. » (…)
« L’Américain moyen consacre plus de mille six cents heures par an à sa voiture. Il y est assis, qu’elle soit en marche ou à l’arrêt. Il la gare ou cherche à le faire. Il travaille pour payer le premier versement comptant ou les traites mensuelles, l’essence, les péages, l’assurance, les impôts ou les contraventions. De ses seize heures de veille chaque jour, il en donne quatre à sa voiture, qu’il l’utilise ou gagne les moyens de le faire. Ce chiffre ne comprend même pas le temps absorbé par des activités secondaires imposées par la circulation : le temps passé à l’hôpital, au tribunal ou au garage, le temps passé à étudier la publicité automobile ou à recueillir les conseils pour acheter la prochaine fois une meilleure bagnole. Presque partout on constate que le coût total des accidents de la route et celui des universités sont du même ordre et qu’ils croissent avec le produit social. (…)
S’il exerce une activité professionnelle, l’Américain moyen dépense mille six cents heures chaque année pour parcourir dix mille kilomètres. Cela représente à peine 6 kilomètres par heure. Dans un pays totalement dépourvu d’industrie de la circulation, les gens atteignent la même vitesse et ils vont où ils veulent à pied, en n’y consacrant non plus 28% mais de 3 à 8 % de leur budget-temps social. Sur ce point, la différence entre les pays riches  et les pays pauvres ne tient pas à ce que la majorité franchit plus de km en une heure de son existence, mais à ce que plus d’heures sont dévolues à consommer de fortes doses d’énergie conditionnées et inégalement réparties par l’industrie de la circulation. (..)
La consommation obligatoire d’un bien  qui consomme beaucoup d’énergie (le transport motorisé) restreint les conditions de jouissance d’une valeur d’usage surabondante (la capacité innée de transit). La circulation nous offre l’exemple d’une loi économique générale : tout produit industriel dont la consommation par personne dépasse un niveau donné exerce un pouvoir radical sur la satisfaction d’un besoin. Passé un certain seuil l’école ferme l’accès au savoir, le système de soins médicaux détruit les sources thérapeutiques de la santé, le transport paralyse la circulation. (…)
Un combat acharné entre vélos et moteurs vient à peine de s’achever. Au Vietnam, une armé sur-industrialisée n’a pu défaire un petit peuple qui se déplaçait à la vitesse de ses bicyclettes. La leçon est claire. Des armées dotées d’un gros potentiel d’énergie peuvent supprimer des hommes-à la fois ceux qu’elles défendent et ceux qu’elles combattent-mais elles ne peuvent pas grand chose contre un peuple qui se défend lui-même. Il reste à savoir si les Vietnamiens utiliseront dans une économie de paix ce que leur a appris la guerre et s’ils sont prêts à garder les valeurs mêmes qui leur ont permis de vaincre. Il est à craindre qu’au nom du développement industriel et de la consommation croissante d’énergie, les Vietnamiens ne s’infligent à eux-mêmes une défaite en brisant de leurs mains ce système équitable, rationnel et autonome, imposé par les bombardiers à mesure qu’ils les privaient d’essence, de moteurs et de routes.

Conclusions
Si tu veux tuer un homme donne lui tout ce qu’il veut.

Quelles conditions au moins pour une relocalisation écologique de l'économie ?

- Souci de la transparence et de la qualité de l'information,
- Souci de construire les valeurs d'échanges sur le travail métabolique et plus précisément sur le temps de production,
- Souci de l'équité des échanges,
- Souci de la retenue ou de l'atténuation de l'impact environnemental.


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